Rio Tinto : PDG démissionne après la polémique ESG

Sep 16, 2020

Contrairement à ce que son nom aux sonorités chatoyantes pourrait laisser croire, Rio Tinto n’est pas une entreprise qui fait des cocktails. En fait, c’est un des plus grands groupes miniers au monde. 

Pourquoi nous vous en parlons ? Car une controverse récente dont il a été l’objet illustre parfaitement l’importance croissante de l’impact social des entreprises, et le fait que de nos jours, la seule réussite financière ne suffit plus.

Un leader mondial de l’industrie minière fait “une boulette”

Rio Tinto, qui tire son nom de la rivière Espagnole où s’est installé leur premier site d’extraction minière en 1873, pèse aujourd’hui plus de 80 milliards de dollars en bourse et affiche une performance historique impressionnante. Rien que depuis la nomination de son (futur ex) PDG Jean-Sébastien Jacques en 2016, l’entreprise a délivré un rendement total d’environ 200% à ses actionnaires, si l’on tient compte de la hausse du cours de l’action ainsi que des dividendes versés. 

Alors pourquoi avoir annoncé son départ ? Car Rio Tinto a récemment (et délibérément) démoli deux grottes sacrées du peuple Aborigène Australien vieilles de 45,000 ans, afin d’accéder à un dépôt de minerai de fer d’une valeur estimée de 97 millions de dollars. Soyons clairs, la société avait obtenu toutes les autorisations administratives nécessaires. Mais le monde a évolué, et il ne suffit plus d’avoir le droit, il s’agit aujourd’hui d’être aussi socialement juste. 

Une réponse inadéquate scelle le sort des dirigeants

Au-delà de l’acte lui-même, le marché reproche aux dirigeants impliqués d’avoir mal réagi à la polémique. D’abord en attendant plusieurs semaines avant de se prononcer en public sur le sujet. Ensuite, en minimisant la gravité des faits, en indiquant à la commission parlementaire australienne ne pas avoir été conscient de la valeur culturelle du site détruit et, comble de l’hypocrisie, en parlant de “malentendu”.  

L’annonce par Rio Tinto d’une réduction de 4 millions de dollars Australiens des bonus du directoire a fini de faire déborder le vase. Comme s'il était possible mettre une étiquette tarifaire, de toutes les façons perçue comme trop basse, sur des sites historiques d’une valeur culturelle inestimable.

Sous la pression du public, d’anciens premier ministres et surtout de grands investisseurs, la position de Rio Tinto est devenue intenable. Et malgré sa résistance initiale, le PDG a fini par présenter sa démission. 

Il n’y a pas que l’environnement dans la vie

Ce départ forcé est d’autant plus remarquable que Rio Tinto fait partie des sociétés minières ayant intégré le respect de l’environnement dans ses principes opérationnels. Elle a bien conscience que pour réussir dans une industrie qui par nature altère l’environnement, une approche responsable est un impératif absolu. Ainsi, elle a décidé relativement tôt de se séparer de la totalité de ses activités charbonnières et présente aujourd’hui un bilan sans faute en matière de protection de ses employés.

La démission de Jean-Sébastien Jacques reflète l’évolution de notre société et des priorités des investisseurs plus spécifiquement. Ces derniers ne se soucient plus seulement des résultats financiers et du E de environnement, mais aussi de plus en plus du S de social et du G de gouvernance.

Le traitement équitable de ses fournisseurs, le respect des droits des employés ainsi que des valeurs des communautés où l’on opère sont autant de facteurs que les dirigeants d’entreprise doivent aujourd’hui prendre en compte, au même titre que les revenus, la croissance et la rentabilité.

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