La magie des produits structurés

Aug 31, 2022

Depuis le début de l’année, les marchés financiers ont été secoués, avant de rebondir au mois de juillet. Problème : l'environnement économique reste compliqué à anticiper. La guerre en Ukraine, les tensions sur le marché de l'énergie et l'inflation créent de l'incertitude, et nous savons bien que les marchés n'aiment pas ça. 

Dans ce contexte, de nombreux investisseurs se tournent vers des placements dits “structurés”, car ces derniers permettent de générer des gains même si les marchés descendent (jusqu'à une certaine limite). Voici tout ce qu'il y a à savoir sur le sujet.

La “magie” des produits structurés

Une infinité de produits structurés possible

Un produit structuré est un placement associant plusieurs instruments financiers pour délivrer un rendement cible, sous certaines conditions. Pour le dire de manière extrêmement simplifiée, c'est un placement avec des “si...” et des “tant que...”.

Par exemple, il peut s’agir d’un placement à capital garanti qui versera 2,5% annuellement pendant 3 ans, tant que le CAC 40 ne tombe pas sous son niveau constaté au départ. En cas de baisse, l’investisseur ne percevra aucune rémunération, mais récupèrera la somme qu’il a placé initialement.

Ou encore d’une obligation à 5 ans qui versera 9% par an, tant qu’aucune des actions Apple, Google et Microsoft ne baisse de plus de 30%. Mais où l’investisseur perdra autant de son capital que la pire performance des trois actions, si l’une ou plusieurs d’entre elles tombe de plus de 30%.

Nous rentrerons dans plus de détails techniques plus tard, mais pour l’instant, contentons-nous de reconnaître que le terme “produits structurés” couvre un vaste univers de placements financiers, plus ou moins risqués et complexes. Mais qui délivrent un rendement connu à l’avance, selon une formule précise et tant que certaines conditions prédéfinies sont respectées.  

Un peu comme à la roulette ? Pas vraiment...

La comparaison est tentante. Car lorsque vous pariez sur le rouge vous savez que vous avez un peu moins d’une chance sur deux de doubler votre mise. Et vous avez une chance sur 37 de gagner si vous pariez sur un chiffre spécifique, compris entre zéro et 36, avec un gain potentiel de 35 fois votre mise.

Les points communs avec les produits structurés sont que vous connaissez le gain possible à l'avance, et que vous pouvez doser la quantité de risque que vous souhaitez prendre. Pour un risque faible, vous miserez sur une couleur, ou sur pair ou impair. Pour plus d’adrénaline, vous miserez sur un, ou plusieurs chiffres spécifiques.

Mais c’est là où la ressemblance s’arrête. Car à la roulette, à la longue, vous êtes sûr de perdre. Les probabilités statistiques sont contre vous. Par ailleurs, le résultat de chaque tour de roue est complètement aléatoire et surtout indépendant des précédents. Ce n'est pas parce qu'on tombe trois fois d'affilé sur le noir que le quatrième tour sera plus plausiblement rouge.

Pour les produits structurés, il en est autrement. Car vous pouvez développer une opinion sur les caractéristiques du placement proposé. Pour revenir à nos exemples, un investisseur peut se faire un point de vue sur l’évolution probable du CAC 40 ou encore des perspectives d’Apple, de Google et de Microsoft. Et donc de juger si le scénario de perte imbriqué dans un produit structuré est peu ou très probable. Il y a une part d'incertitude, mais bien moindre que sur un jeu de hasard pur.

Gagner alors que les marchés baissent !

Comme nous l’avons exprimé dans au début, la grande qualité des produits structurés est qu’ils peuvent vous faire gagner de l’argent alors que les marchés chutent. De très nombreux produits structurés sont justement conçus pour délivrer un rendement positif, tant qu’un indice financier (ou, pour faire simple, tant qu’un marché donné, comme par exemple les grandes valeurs européennes cotées) ne chute pas de plus de 20, 30 ou 50% par exemple.

Pour comprendre comment c'est possible, le moment est venu de se pencher sur les caractéristiques typiques de ces placements structurés.

Les composantes clés des Produits Structurés

L’émetteur du Produit Structuré

Dans la pratique, quand vous investissez dans un produit structuré, l’argent que vous et d’autres investisseurs placez est collecté par une banque, comme par exemple la Société Générale ou BNP Paribas. Celles-ci se financent en émettant des notes (aussi appelées des obligations, une sorte de reconnaissance de dette). La banque en question est l’émetteur du produit structuré.

Cela a son importance, parce qu’en achetant une ou plusieurs notes structurées, l’investisseur prend un risque sur l’émetteur de l’obligation, c'est-à-dire la banque émettrice. Si elle fait défaut, il risque de ne pas récupérer (une partie de) son capital de départ. Il s’agit donc de se faire une opinion sur la solidité financière de l’émetteur avant d’investir. Bonne nouvelle, les grandes banques françaises ont toutes considérablement renforcé leurs niveaux de capitaux propres et sont plutôt bien notées par les agences de notation de crédit. 

Le coupon (ou le rendement visé)

Deuxième élément crucial, tout produit structuré doit indiquer un rendement cible. Par exemple 10% par an, ou “deux fois la performance du CAC 40”. C’est par rapport à ce rendement financier visé qu’il faudra comparer les risques du placement, avant d’investir. De façon générale pour les obligations, dont les produits structurés ne sont qu'un segment, ce rendement cible est aussi appelé le "coupon".

Le sous-jacent (ou le marché de référence)

Vous l’aurez compris, pour bien évaluer le risque d’un produit structuré, il faut bien comprendre la formule qui détermine si et quand la rémunération cible sera versée ou pas. Cette formule dépend typiquement de l’évolution d’un marché financier spécifique ou d’une ou plusieurs valeurs financières bien identifiées. Comme par exemple l’indice CAC 40, l’Eurostoxx 50 ou le S&P 500, l’action LVMH ou un panier d’actions (comme Apple, Google et Microsoft dans notre exemple précité). Cette ou ces valeurs de référence sont aussi appelées le sous-jacent du produit structuré.

Il est donc recommandé de bien comprendre le sous-jacent, et d’en évaluer la volatilité. Lorsque le sous-jacent est une action unique, ou un ensemble d’actions, sachez que son prix pourra évoluer de façon plus marquée que s’il s’agit d’un indice, composé de dizaines d’actions différentes. Du reste, certains indices peuvent eux-mêmes embarquer leur propre formule de calcul. On pourra avoir par exemple un indice qui réplique le CAC40 dividendes réinvestis, ou un indice qui au contraire le réplique sans dividendes réinvestis. Cela a son importance.

Les barrières de protection

La formule permettant de déterminer la rémunération d’un produit structuré dépend de l’évolution de son sous-jacent. En l’occurrence, il est fréquent qu’un produit structuré soit conçu pour permettre à l’investisseur de recevoir sa rémunération (son coupon) et/ou de récupérer son capital, même si ce sous-jacent baisse pendant la durée de vie du placement. En revanche, il est fréquent que cette baisse soit contrainte par une certaine limite. Au-delà de laquelle l’investisseur peut perdre sa rémunération cible (il ne touche plus de coupons), ou même perdre une partie de son capital investi initialement.

On parle alors de barrières de protection. Qui peuvent être de deux natures. Une première qui protège le paiement des coupons, et une seconde qui protège le capital. 

Prenons un exemple concret. Cashbee propose le produit structuré “Exigence 16” à ses utilisateurs. Son sous-jacent sera l’indice ”iStoxx France ESG 40 Décrément 50”. 

Pour ce produit spécifique, la rémunération cible est de 10% par an sur 10 ans. La barrière de protection s’appliquant aux coupons est de 30%. Ce qui veut dire que si cet indice, à l’échéance, a baissé par rapport à son niveau initial et que cette baisse est inférieure à 30%, l’émetteur devra quand même payer tous les coupons en plus du remboursement de la totalité du capital investi aux investisseurs. Donc dans ce scénario, il vous verse 10 * 10%, soit 100% (en coupons) plus 100% de votre investissement initial (le remboursement du capital), dans 10 ans. Vous aurez doublé votre mise.

La barrière de protection relative au capital est de 50%. Ce qui signifie que si, à l’échéance, l’indice sous-jacent a baissé de plus de 30%, mais de moins de 50%, l’émetteur ne versera aucun coupon, mais devra tout de même rendre la totalité du capital investi à chaque investisseur.

Attention, si à maturité la baisse de l’indice est supérieure à 50% par rapport au niveau de départ, les investisseurs perdront non seulement tous les coupons, mais aussi une partie de leur capital. Cette perte en capital sera égale à la baisse de l’indice. Si celui-ci a perdu 60% de sa valeur à l’échéance, chaque investisseur ne sera remboursé que de 40% de sa mise de départ.

Les barrières de protection protègent l’investisseur, mais dans une certaine limite. Il est donc très important de bien vérifier de quelles barrières de protection vous bénéficiez. Plus les seuils seront éloignés du niveau de référence (typiquement le niveau constaté initialement), plus votre protection sera élevée. Mais plus votre protection est importante, moins la rémunération visée (le coupon) sera élevée.

La période de souscription

Il est possible de souscrire à un produit structuré donné pendant une période de temps limitée, appelée période de souscription ou de commercialisation, qui dure généralement quelques semaines. La fin de la période de souscription est connue à l’avance. Elle correspond à la date d’émission du produit par la banque émettrice, c’est-à-dire au moment où le cours initial (ou “strike”) du sous-jacent est fixé. Pour reprendre l’exemple de la roulette, c’est le moment où le croupier annonce “les jeux sont faits”.

Focus sur les Produits Structurés de type “Auto-Call”

Pour cette partie de l’article, nous nous focaliserons sur un segment important des Produits Structurés, celui des produits dits “Auto-Call” (et dont Exigence 16 est un excellent exemple). Ils sont ainsi désignés parce leur durée de vie est variable. Explications.

L’échéance d’un produit structuré (aussi appelé maturité)

Un produit structuré à une date de départ, correspondant à sa date d’émission, à laquelle on constate le niveau initial du sous-jacent. C’est par rapport à ce niveau initial que les observations seront faites durant la vie du placement.

Il possède aussi une date de fin, appelée échéance ou maturité. Typiquement, la vie d’un produit structuré se compte en années. Ainsi, le produit Exigence 16 a une durée de vie maximale de 10 ans.

Le remboursement par anticipation, ou “Auto-Call”

Un produit structuré de type “auto-call” possède une durée de vie variable. Son échéance ne représente que sa durée de vie maximale. Il peut en effet être remboursé par l’émetteur — de façon automatique — si une ou plusieurs conditions prédéfinies sont réalisées.  

Dans le cas d’Exigence 16, le produit structuré court au moins pendant un an. Au bout de cette première année, et pour tous les jours ouvrés suivants, jusqu’à l’échéance fixée en Novembre 2032 (dans 10 ans), on observe le sous-jacent. Si l’indice iStoxx France ESG 40 Décrément 50 se trouve au-dessus de son niveau initial, constaté à son lancement, alors le produit s’éteint. On dit qu’il est "rappelé" (ou, en utilisant du mauvais franglais, qu’il est “callé”). D’où son acronyme “Auto-Call”, pour call automatique. 

Les investisseurs sont alors remboursés et reçoivent les coupons pour la durée de vie du produit. Si, dans le cas d’Exigence 16, le remboursement par anticipation se déclenche au bout de 4 ans et 6 mois, l’investisseur va recevoir 4,5 * 10% soit 45% de son investissement, en plus du remboursement de son capital.

Ok, mais comment est-ce possible ?

On peut légitimement se demander pourquoi une banque vous donnerait de l'argent alors que le sous-jacent investi baisse. Mais le secret d’un produit structuré est justement qu'il est ... euh ... structuré. En coulisses, la banque fait usage de nombreux produits combinés entre eux, qui permettent de proposer un rendement positif même si la valeur du sous-jacent baisse (dans la limite des barrières de protection).

Sans donner un cours de finance de marchés, voici quelques éléments qui entrent en compte dans le pricing d’un produit structuré :

  • La rémunération de l’investisseur est limitée. Dans Exigence 16 par exemple, l’investisseur vise une rémunération de 10% par an. Ce qui signifie qu’il ne peut pas gagner plus. Ainsi, si l’indice sous-jacent s’envole et progresse de 80% en un an, l’investisseur sera remboursé à la première date d’observation et ne touchera “que” 10%. 
  • L’investisseur accepte une date de remboursement variable. Toujours dans le même exemple, la date de remboursement du produit structuré peut tomber n’importe quel jour ouvré entre la première date d’anniversaire du produit structuré et son échéance finale, dans 10 ans.
  • L’investisseur accepte le risque de défaut de l’émetteur. Ce risque est faible, certes, mais son acceptation a une valeur.

C’est la combinaison de ces facteurs qui permettent aux banquiers structureurs du produit d’extraire de la valeur, et donc d’inclure les fameuses barrières de protection au sein de la note structurée.

Pour conclure, dans le contexte actuel de marché, où l’incertitude règne, il nous semblait pertinent d’élargir notre gamme de placements afin d’aussi proposer des produits structurés. Car il s’agit d’une alternative certes plus complexe que des investissements plus traditionnels, comme le Livret Cashbee ou un fonds euro, mais qui offre la possibilité de viser un rendement significativement plus attractif pour un risque mesuré. Caractéristique importante, ce placement délivre son rendement même en cas de baisse (limitée) des marchés. Il a donc sa place dans un portefeuille d’investissement bien diversifié.

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