Le Ministre de L’Économie et des Finances, Bruno Le Maire l’a formellement annoncé, le taux du livret A restera bloqué à 3%. Il déroge ainsi à la formule de calcul qui l’aurait porté à 4,1%. Pourquoi et avec quelles conséquences ?
Pourquoi le taux du Livret A ne dépassera pas 3% ?
Une dérogation à la règle parfaitement légale
La règle de calcul du Livret A est basée sur deux facteurs : l’inflation corrigée du coût du tabac et l’€ster, un taux d’intérêt de référence sur les marchés financiers. Selon cette règle, et notamment en conséquence d’un niveau d’inflation toujours relativement élevé, le taux du Livret A aurait dû passer à 4,1% au 1er août.
Elle n’est cependant pas absolue. Dans les faits, le taux du Livret A est fixé par le Ministre de l’Économie et des Finances, sur proposition du Gouverneur de la Banque de France.
Et c’est bien ce dernier qui a choisi de déroger à la règle, et de proposer au Ministre Bruno Le Maire de maintenir le taux du Livret A au niveau actuel, c’est-à-dire à 3%. Le Ministre a suivi la recommandation à la lettre, tout en précisant que ce taux sera maintenu pendant au moins 18 mois (au lieu d’une révision du taux tous les 6 mois).
Limiter la hausse du coût du financement des logements sociaux
La première raison de cet immobilisme est sans doute de vouloir protéger le coût du financement des logements sociaux. Rappelons que la très grande partie des dépôts sur le Livret A est destinée à financer le logement social et le renouvellement urbain.
Il s'ensuit que toute augmentation du taux du livret A impacte directement le coût auquel les organismes sociaux se financent. Une augmentation de 1% du taux du Livret A se traduit par des dizaines de millions d’euros d’intérêts supplémentaires que les constructeurs de logement sociaux auraient du mal à supporter.
Ne pas drainer trop d’épargne
Les augmentations successives du taux du Livret A représentent une aubaine pour les quelque 55 millions de détenteurs de ce type de compte. Et chaque hausse rend ce support d’épargne un peu plus attractif, en absolu, mais aussi en relatif par rapport à d’autres placements.
Sans grande surprise, les hausses de taux du Livret A déclenchent des mouvements de collecte. Au détriment soit de la consommation (les personnes préfèrent mettre de côté plutôt que d’acheter des biens ou des services), soit d’autres investissements, comme par exemple le fonds Euro des contrats assurance vie.
Ce dernier est perçu — tout comme le Livret A d’ailleurs — comme un placement très peu risqué, qui reste accessible en cas de coup dur. Or les fonds Euro ont, en moyenne, délivré un rendement d’environ 2% l’année dernière. Si le taux du Livret A avait été porté à plus du double de ce rendement, nous aurions pu craindre des transferts massifs des fonds euros vers le Livret A. Or, afin de pouvoir garantir le capital, les fonds euros investissent massivement dans les obligations d’État, des placements sans risques. Et la France doit pouvoir compter sur la demande de ces fonds pour placer les obligations qu’elle émet, dans le cadre de son programme de financement de la nation.
Ne pas freiner la consommation
Nous l’avons cité plus haut, un Livret A attractif peut peser sur la consommation des ménages, qui sont tentés d’abonder leurs Livrets A plutôt que de faire du shopping.
Or notre économie a besoin de cette demande. Sans elle, le ralentissement économique pourrait se transformer en récession, avec de lourdes conséquences sur les entreprises et l’emploi.
Source : Moneyvox
Et comme le démontre le graphique ci-dessus, la remontée récente du taux du Livret A a été fulgurante depuis le début de l’année dernière. En relatif, son taux a été multiplié par 6 depuis février 2022.
Éviter la baisse future
Ce dernier argument est un peu plus subtil. Mais il se pourrait que les décideurs aient eu en tête que si les hausses répétées du taux de Livret A font plutôt plaisir aux épargnants, les baisses futures seront moins favorablement perçues. Or, il est probable que la Banque Centrale Européenne finisse par vaincre l’inflation dans les trimestres à venir. Ce qui conduirait à une ou plusieurs révisions à la baisse du taux applicable au Livret A (selon la formule).
Et c’est peut-être donc aussi pour éviter le phénomène du yo-yo que le taux a été bloqué à 3% cette fois-ci, tout en garantissant le niveau pour les 18 mois à venir.
Le manque à gagner pour les épargnants
Si le blocage du taux du Livret A peut s’expliquer, il est n’en est pas moins vrai que cette décision a des réelles conséquences pour les épargnants. Le manque à gagner sur un an représente 1,1%, soit 11 euros par 1 000 euros déposés sur un Livret A.
Or, les Français disposent en moyenne de 5 800 euros sur leurs Livrets A. Pour ce dépôt moyen, la différence entre le taux théorique de 4,1% et le 3% retenu représente 63,80 euros sur un an. À son plafond de 22 950 euros, le manque à gagner annuel est égal à 252,45 euros.
À l’échelle nationale, avec un encours de 350 milliards d’euros, la fixation du taux à 3% représente pas loin de 4 milliards d’euros en intérêts qui ne seront pas versés aux détenteurs des Livrets A.
Que faire si on est au plafond du Livret A ?
Environ 8% des Livrets A sont aujourd’hui à leur plafond de 22 950 euros par personne. Ensemble, ces Livret A “au plafond” représentent un peu plus de 30% de l’encours total. Pour les ménages concernés, il existe d’autres moyens pour faire fructifier son épargne sans prendre beaucoup de risques.
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