Les effets bénéfiques de la parité

Nov 6, 2023

Le sujet de la parité des sexes au sein des entreprises est plus que jamais d’actualité. Au-delà d’être juste, est-il rentable de favoriser la parité hommes femmes au travail ? La réponse est oui.

Le plus gros gestionnaire du monde s’intéresse à la parité

Blackrock est un géant dans la gestion de fortune. À la fin du mois de juin de cette année, la société de gestion américaine avait 9,42 trilliards de Dollars sous gestion, ce qui en fait le plus gros investisseur au monde.

Ses équipes de recherche ont récemment publié un rapport édifiant, qui se focalise sur les effets économiques de la parité au sein de sociétés cotées en bourse. 

La méthode d’analyse

Avant d’arriver aux conclusions du rapport, décrivons d’abord l’importance des travaux entrepris, qui leur donne une grande crédibilité. Les équipes de Blackrock ont étudié la performance financière de 1250 grandes entreprises dans le monde qui publient des statistiques régulières sur la composition de leurs forces de travail. Cela a permis de standardiser les données étudiées.

Par ailleurs, ces données ont été collectées sur une période longue, allant de 2013 à 2022. Les analystes en ont tiré plusieurs conclusions claires et nettes. Et il se trouve qu’il existe bien une corrélation entre la parité des sexes au sein de l’entreprise et sa performance financière. 

La performance financière a été définie comme le retour sur actifs, afin d’éviter des incohérences dans l’analyse qui auraient pu voir le jour en retenant la performance boursière des actions des entreprises (qui est beaucoup plus volatile et qui peut dépendre de facteurs moins tangibles, comme le sentiment de marché).

Sur cette mesure, les entreprises étudiées ont été distribuées en quintiles, représentées dans le graph ci-dessous, publié dans le vénérable Financial Times.

Les entreprises paritaires sur-performent

Le premier constat est de taille et sans appel : les entreprises les plus paritaires ont, en moyenne, généré un retour sur actif annuel de 7,7%. C’est 1,6% de mieux que les entreprises où le pourcentage d’employées féminines est le plus élevé et même 2,1% au-dessus du retour sur actifs que produisent les sociétés dont le personnel est proportionnellement le plus masculin. 

Autrement dit, non seulement la corrélation entre la parité hommes / femmes et la performance financière d’une entreprise est positive, mais ce facteur peut, à lui seul, faire une réelle différence dans le temps.

Et cette conclusion se maintient lorsqu’on applique l’analyse à un secteur industriel précis (luxe, grande distribution, banque, …), ou encore à un pays donné. 

En affinant leurs analyses, les chercheurs ont constaté que l’effet bénéfique de la parité entre sexes augmente, si celle-ci existe au sein :

  • des forces commerciales (génératrices de revenus), 
  • des équipes d'ingénieur(e)s, et 
  • des postes à hautes responsabilités, bénéficiant typiquement des plus hauts salaires.

D’autres liens entre équité sociale et performance financière

Le rapport met aussi en évidence que les entreprises qui permettent aux femmes de prendre des congés maternité plus longs génèrent une performance financière supérieure à celles où les congés maternité accordés sont plus courts.

Il semblerait qu’un congé maternité long fasse partie des avantages sociaux qui favorisent une culture d’entreprise positive. Les employé(e)s — hommes et femmes — y perçoivent un signal fort que leur entreprise valorise sa force de travail, que l’employeur considère comme un véritable atout distinctif, à respecter et à fidéliser.

Une étude qui tombe à pic, alors que les valeurs ESG sont critiquées

Le monde de l’investissement et de la gestion d’actifs consacre depuis une dizaine d’années de plus en plus de ressources à l’évaluation de facteurs ESG, c’est-à-dire les critères Environnement, Social et Gouvernance dans leurs processus de prise de décision pour investir, ou non.

Après un engouement croissant pour ces thématiques, un certain nombre d’investisseurs institutionnels et particuliers accusent les gestionnaires d’actifs de donner trop d’importance à ces critères extra-financiers. Ils reprochent à des acteurs comme Blackrock de s’écarter de l’objectif principal de leur activité, qui devrait, selon eux, consister à viser uniquement la maximisation du rendement financier de leurs placements. Les critiques les plus virulentes et conservatrices sont allées jusqu’à proposer d’interdire légalement aux gérants de prendre en compte les critères ESG dans leurs prises de décision.

Or, l’analyse de Blackrock sur la parité souligne tout simplement que l’équilibre hommes-femmes au sein des entreprises est financièrement favorable à ses actionnaires. En poussant le raisonnement un peu plus loin, l’obligation fiduciaire des gestionnaires devrait logiquement les pousser à prendre la représentation des genres en considération, avant d’investir dans telle ou telle entreprise.

Parité entre sexes ne veut pas dire parité des salaires

Le timing de la publication est également fortuit, car sa parution précède de peu un point marquant illustrant l'inégalité des salaires. En effet, selon la newsletter féministe “Les Glorieuses”, c’est le lundi 6 novembre à partir de 11.35 heures que l’inégalité de salaires par rapport aux hommes fait qu’en France les femmes travaillent gratuitement.

À partir du moment où il est rentable de viser la parité dans ses équipes, une façon d’y parvenir est sans doute de proposer des salaires égaux à poste égal, non ?

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