La success story d’OVHcloud
Pour des entrepreneurs comme nous, l’histoire d’OVH a de quoi faire rêver. La société est fondée en 1999, par Octave Klaba, un immigré polonais qui fait ses études d’ingénieur à Lille. Après des débuts dans des locaux parisiens prêtés par un certain Xavier Niel, la société s’installe à Roubaix pour poursuivre sa fulgurante croissance dans le monde du stockage de données digitales. Pour affirmer son orientation stratégique, OVH se renomme OVHcloud en 2019. Elle est devenue un acteur qui compte dans le “cloud”, aux côtés des leaders mondiaux que sont AWS, la filiale d’Amazon, et Microsoft.
Une croissance financée par des levées de fonds successives
Pour financer son expansion internationale et le recrutement de ses équipes — OVHcloud emploie aujourd’hui 2 500 personnes — l’entreprise a fait appel à des capitaux externes à plusieurs reprises dans son histoire. Parfaitement en ligne avec le chemin tracé par de nombreuses entreprises technologiques avant elle, ces fonds ont surtout été apportés par des fonds spécialisés.
Ces opérations sont d’envergure importante. Ainsi, en octobre 2016, OVH ouvre son capital aux fonds d'investissements américains KKR et Towerbrook à hauteur de 250 millions d'euros, après avoir levé 160 millions en 2014.
Ayant atteint un stade de maturité incontestable, OVHcloud annonce en mars 2021 sa volonté d’entrer en bourse, et plus précisément à la Bourse de Paris. Contrairement à de nombreuses sociétés technologiques européennes qui ont fait le choix de s’expatrier aux États-Unis.
Une opération politiquement importante
Cela fait de l’introduction en bourse d’OVHcloud un sujet politico-stratégique. Pour au moins deux raisons.
Le cloud, universel en théorie, est-il américain dans la pratique ?
Même si cela n’est pas nécessairement très tangible pour le commun des mortels, le stockage de données est devenu un enjeu stratégique. De plus en plus de banques et d'hôpitaux utilisent le Cloud pour y stocker les données personnelles de leurs clients / patients par exemple. En toute sécurité à priori.
Mais si le choix se limite à utiliser les services d’AWS, la filiale spécialiste d’Amazon, ou Azure de Microsoft, les Européens peuvent se demander s’il est stratégiquement sain de reposer à ce point sur des sociétés américaines, et leur confier autant de données sensibles.
Avoir un acteur européen, français de surcroît, dans le secteur de la conservation de données digitales constitue un avantage considérable.
La relocalisation aux États-Unis n’est pas une fatalité
Quand en 2013 Critéo, la pépite française du marketing digital cherche à accélérer sa croissance et souhaite lever des fonds, la question ne se pose pas longtemps. Il faut aller sur le Nasdaq, la bourse américaine spécialiste en valeurs technologiques. Apple, Google et Facebook… tous les grands acteurs de la tech y sont cotés.
D’ailleurs, les firmes technologiques européennes ne sont pas les seules à conclure que le Nasdaq s’impose pour ceux qui veulent lever des sommes importantes. Les géants technologiques chinois, comme Alibaba, Tencent ou encore Baidu ont tous fait le même choix.
Car la logique veut qu’on aille chercher l’argent là où il se trouve. Et il ne fait aucun doute que les marchés de capitaux américains sont plus développés en la matière. N’oubliez pas qu’investir en actions comporte du risque. Et que ce risque est plus élevé lorsqu’il s’agit d’actions de sociétés jeunes, en hyper-croissance certes, mais pas nécessairement profitables. Il se trouve que la base d’investisseurs prêts à prendre ce type de risque est bien plus large et sophistiquée aux US qu’en Europe par exemple. D’ailleurs, la dernière introduction en bourse de ce type sur la place de Paris remonte à 1996, lorsque Dassault Systèmes s’est faite coter !
Donc le fait qu’OVHcloud s’introduise sur l’Euronext est un signal fort. Il indique à l’écosystème grandissant de la tech française et européenne que le soutien financier dont il a besoin peut aussi se trouver en Europe. La traversée de l’Atlantique n’est pas la seule issue possible.
Une introduction réussie
OVHcloud a dû faire preuve de résilience, notamment lorsqu’un incendie détruit ses data centers strasbourgeois et l’oblige à retarder l’opération financière. Mais le 15 octobre, le deal s’exécute et le prix de l’action est fixé à 18,50 euros. Durant la première journée de cotation, la demande se manifeste et l’action termine la journée en hausse de 6,5%, à 19,70 euros. À ce prix, OVHcloud est valorisée à un peu plus de 3,5 milliards d’euros.
Sans surprises, le secrétaire d’État chargé de la Transition Numérique et des Communications Électroniques Cédric O est parmi les premiers à féliciter l’équipe dirigeante d’OVH. Via un tweet, il salue ce “grand jour pour la #frenchtech”.
OVHcloud vient de prouver qu’il était possible de lever 350 millions d’euros via une cotation à la bourse de Paris. Qui suivra ?
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